Selon les images dans la presse, une tornade a frappé Putte et Sint-Katelijne-Waver ce mercredi 3 janvier. Les scientifiques de l’IRM ont fait une analyse de ce phénomène sur base de la situation atmosphérique et des images radar.
Qu'est-ce qu'une tornade exactement et comment se forme-t-elle ?
Les tornades sont sans aucun doute l'un des phénomènes météorologiques les plus dévastateurs de notre planète. Une tornade se manifeste sous la forme de vents puissants s’organisant en rotation autour d’un axe plus ou moins perpendiculaire à la surface du sol (analogie à un entonnoir) et est généralement associée à une supercellule orageuse (orage en rotation). Ces vents rotatifs se déplacent en créant un effet d’aspiration sur la surface du sol, entraînant des dégâts importants (branches arrachées, arbres déracinés, maisons détruites). Les vitesses de vent associées aux tornades peuvent atteindre jusqu'à 500 kilomètres par heure. Lors d'orages violents, une ou plusieurs tornades peuvent se produire sous certaines conditions. En Belgique, la durée de vie d'une tornade varie de quelques secondes à 15 minutes.
Dans quel contexte a-t-elle pu se produire?
Le mercredi 3 janvier, notre pays était sous l'influence de courants maritimes d'ouest à sud-ouest dans le sillage de la dépression Henk. La masse d'air était instable: le contraste entre la température de l'air froid en altitude et celle de l'air plus doux en surface était en effet important. Cela est propice au développement d'averses (convection). Par ailleurs, des creux d'altitude contribuaient parfois à accroître les courants ascendants et donc à amplifier l'intensité de certaines averses (devenant même parfois orageuses). Le vent était soutenu et caractérisé par une variation importante de sa vitesse en fonction de l'altitude, donnant lieu à du "cisaillement". La combinaison entre de fortes ascendances au sein des averses intenses et un cisaillement marqué dans l'atmosphère, donne lieu à des structures convectives organisées et ayant une durée de vie prolongée. Par le biais de mécanismes complexes, ces structures peuvent être le siège de rafales descendantes (coulée d'air froid rabattue vers la surface) et/ou de rotation très localisées; ces dernières peuvent alors conduire à une tornade. Ce contexte instable avec du cisaillement peut se rencontrer en toute saison.
Fabian Debal, météorologue à l’IRM explique: “Les tornades en été, c’est quelque chose qu’on a déjà rencontré. Peut-être que le public est moins habitué à des tornades dans des averses d’hiver. Il faut donc savoir que c’est aussi quelque chose qui peut arriver dans des averses durant la saison hivernale. Il faut qu’une instabilité soit présente, ce qui était le cas hier (le 3 janvier).”
Comment les images radar peuvent-elles nous aider à identifier des tornades?
Les tornades sont des phénomènes très locaux, et elles ont souvent une durée de vie relativement courte. Elles passent souvent entre les mailles du filet du réseau d’observation ‘classique’, comme par exemple des stations des mesures officielles. En particulier quand une tornade frappe la nuit, et que nous ne disposons pas d’observations visuelles, il est parfois très difficile d’analyser et de confirmer l'occurrence d’une éventuelle tornade.
Un instrument qui est très utile pour l’analyse d’une éventuelle tornade, est le radar météorologique. Avec un tel radar, il est possible de mesurer l’intensité mais aussi la vitesse des zones de précipitations grâce aux images dites ‘Doppler’. C’est surtout la détection du mouvement qui est très importante lors de la l'analyse à postériori des dégâts suite aux vents. Nous pouvons ainsi déterminer s’il y avait une rotation dans le nuage, ce qui est souvent un précurseur au développement d'une tornade. La tornade même n’est jamais présente sur les images radar, car elle se développe en dessous du faisceau du radar. Les dimensions de celle-ci sont aussi souvent trop petites que pour être détectées par le radar. Ce que le radar détecte en réalité, c’est la cellule orageuse qui génère la tornade.
L'important dans l'interprétation des images Doppler est qu'un radar météorologique ne peut détecter que le mouvement vers ou depuis le radar. Le radar détecte en effet la vitesse à laquelle les précipitations s'éloignent ou se rapprochent du radar. C'est pourquoi on parle de « vitesse radiale ». Dans l’animation, cela est indiqué par une couleur verte (se rapprochant du radar) et rouge (s’éloignant du radar). Les images Doppler sont souvent complexes et bruitées dans ce genre de situations très dynamiques. Par conséquent, il n'est pas toujours possible de tirer des conclusions définitives quant à la nature du phénomène. Sur les images radar du 3 janvier, une structure en rotation peut néanmoins être distinguée.
Il s'agit ci-dessus des images SRV (« Storm Relative Velocity ») réalisées avec le radar de Jabbeke. Ce sont des images Doppler dans lesquelles le mouvement de l'ensemble du complexe a déjà été éliminé, on ne voit donc que le mouvement à l'intérieur de la cellule (mais toujours par rapport au radar). La combinaison de rouge et de bleu indique une zone dans laquelle, à une distance relativement courte, un mouvement vers le radar (bleu) confine à un mouvement loin du radar (rouge). C'est la signature de la rotation dans les images Doppler. On remarque encore que ce n'est pas la tornade elle-même que l'on voit, mais la rotation dans la cellule qui peut donner naissance à une tornade. Pour ce cas précis, le radar est assez éloigné du lieu de la tornade (>100 km), ce qui rend difficile une analyse détaillée. La résolution spatiale d'un radar météorologique diminue avec la distance qui le sépare du radar. De plus, le radar a mesuré cette image à une altitude de 1,7 km, et donc pas au niveau du sol là où s'est produite la tornade. Malheureusement, le radar météorologique Skeyes à Zaventem est actuellement défectueux. Avec ce radar, situé à seulement 20 km du lieu de la tornade, une analyse plus fine aurait certainement été possible.
Observations via l’application mobile de l’IRM
Nous vous rappelons que vous pouvez signaler tous les phénomènes météorologiques, comme par exemple les tornades, directement à nos météorologues via l'application gratuite de l’IRM.